Saint-Barth - Jean-François Breuer

©Patricia Mathieu

Jean-François Breuer : portrait d’un homme qui est (enfin) à sa place

JSB : Vous êtes belge, comédien, musicien et chanteur, racontez-vous !

Jean-François Breuer : Je me destinais à une carrière de pianiste quand j’ai fait ma crise d’adolescence et arrêté le piano. Alors que j’étais novice, j’ai eu la chance d’être accepté au conservatoire de Liège, en théâtre. Avant, je me racontais des histoires en musique, j’ai continué à faire la même chose avec le théâtre. J’ai ensuite fait un maximum de projets. La musique m’a permis d’intégrer le milieu du théâtre, mais sur scène je jouais du piano plus que je ne jouais. Alors j’ai dû refuser tous les projets avec du piano pour ne me consacrer qu’au théâtre. Et ça a fonctionné. J’ai mené ma carrière, je gagne ma vie, mes saisons sont remplies avec mes propres projets qui tournent en Belgique, je n’avais pas besoin d’en sortir. 

Et puis il y a eu “Les garçons et Guillaume, à table !”. L’engouement a été tel qu’il a fallu que je traverse la frontière pour aller jouer en France, à Avignon, Paris et maintenant à Saint-Barth !

 

Vous avez incarné un sosie malgré lui de Freddie Mercury, et aujourd’hui Guillaume Gallienne, « femme » malgré lui. La quête identitaire est un thème qui vous travaille ?

Il faut trouver sa place dans le monde. Ce n’est pas volontaire mais de toutes évidence c’est un thème qui m’intéresse. La pièce sur Freddie Mercury est un texte que j’ai co-écrit avec Dominique Bréda. A la fin de la pièce, le personnage dit « Je voudrais juste être moi ».

Dans “Les garçons et Guillaume, à table !”, c’est difficile pour Guillaume de se trouver et d’être bien dans sa peau. Tous les êtres humains doivent passer pas cette étape pour se trouver. On lutte dans la société pour être comme tout le monde. Personnellement, cela fait 4 ou 5 ans seulement que je suis à ma juste place.

 

Vous êtes venu nous présenter votre adaptation de « Les garçons et Guillaume, à table ! », pièce à succès et adaptée au cinéma. Comment avez-vous trouvé votre place dans ce texte ?

Quand j’ai lu la pièce je n’ai pas pensé au poids de reprendre une telle œuvre, un monument. Je ne pensais pas que j’irai en France et à la prise de risque que ça représentait. Heureusement car sinon, je n’aurai pas repris le spectacle.

En Belgique Guillaume Gallienne n’est pas aussi connu qu’en France, nous n’avons pas d’institution comme celle-là. On a créé la pièce en Belgique en 2022. Avec Patrice Mincke, le metteur en scène, on a essayé de mettre Guillaume Gallienne de côté. Il fallait s’approprier le texte et oublier son interprétation. J’ai refusé de revoir le film. On est partis de moi, Jean-François, et comment ce texte fait écho chez moi. Puis la mise en scène a fait la différence puisqu’elle est complètement différente.

J’adore ce texte, il me parle, il me bouleverse. Personne ne l’avait repris en Belgique alors c’est qu’il m’attendait. Après plus de 100 dates en Belgique, nous sommes allés en France au Festival d’Avignon à l’été 2023 et on y retourne cet été. On a également joué à Paris et une tournée en France va suivre. Pour les Belges, Avignon est un passage obligé pour tourner en France, surtout si on n’est pas connu.

 

Comment ce spectacle parle-t-il de sexualité ?

Ce spectacle est une ode à la femme. On a dit à Guillaume Gallienne (auteur de la pièce, ndlr) qu’il était une fille, dans sa tête il est une fille, mais c’est un garçon et il est hétéro. Il aime les femmes, et sa mère.

Mon travail de comédien c’est que le spectateur ne voit pas un homme jouer une femme, mais voit une femme.

En Belgique on a joué devant des scolaires, en ce moment avec la question du genre, binaire, non binaire… Ce spectacle parle de sexualité, avec subtilité.

 

Comment avez-vous été programmé au Festival de théâtre de Saint-Barth ?

Grâce à Avignon, « Créa diffusion » qui s’occupe de la tournée en France a invité des programmateurs dont Nadège Emmanuelian à venir voir le spectacle. Ensuite elle nous a programmés dans le cadre du festival de Saint-Barth. Je suis ravi de venir présenter ce qu’on fait en Belgique.

 

C’est votre première fois à Saint-Barth ?

Oui. En Belgique on a beaucoup entendu parler de l’île quand Johnny Hallyday est décédé. Ma sœur vit en Martinique donc j’y suis allé plusieurs fois. J’adore la nourriture créole. Je me réjouis de retrouver le soleil, les couleurs, la chaleur, le côté tropical de la France !

 

Journal de Saint-Barth N°1569 du 30/05/2024

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