Saint-Barth -

En 2018, juste après avoir franchi la ligne d’arrivée, Renaud Nicot prend son fils, né à peine un mois plus tôt, dans ses bras.

« Le plus beau jour de ma vie »

En 2018, Renaud Nicot vit une année folle dont sa participation à la Transat aux côtés de Guillaume Farsy est l’un des deux sommets. L’autre, plus intime mais partagé avec tous, fut de prendre son nouveau né dans ses bras à son arrivée dans le port de Gustavia. Récit d’un coureur rêveur.

Vêtu d’un short et d’un tee-shirt, Renaud Nicot affiche son habituelle décontraction lorsqu’il s’avance sous les tonnelles du Village de la Transat. Un large sourire aux lèvres, ce n’est pas sans émotion qu’il se replonge dans les souvenirs de sa participation à la Transat en Double, en 2018. « Un rêve de gosse », assure-t-il.

Baptême en mer à... deux mois
Né à Granville dans la baie du Mont-Saint-Michel, il effectue sa première sortie en mer à l’âge de... deux mois. « Avec mon père », s’amuse-t-il. Inutile de préciser que la passion de la navigation s’empare de lui avant même qu’il ne se tienne sur ses deux jambes. Aussi, quand à 17 ans il quitte le cocon familial pour intégrer le pôle France à La Rochelle, il ne s’agit que d’une suite logique. Et c’est lors de cette période que l’idée de la course au large commence à germer dans son esprit. « A 19 ans j’ai tout quitté pour me mettre au Figaro », se souvient-il. Malheureusement, ses rêves de grande traversée tombent à l’eau. S’il remporte des courses sur l’eau, il perd celle du financement.
En 2018, il est installé à Saint-Barth depuis déjà huit ans quand une proposition vient le cueillir. « On sortait d’Irma, l’île était dévastée, raconte-t-il. Arnaud Grandclerc avait un projet avec le président de la CCI Bretagne de mettre un skipper breton et un autre de Saint-Barth dans un bateau pour la Transat. Il savait que j’avais fait ce type de course avant et il me l’a proposé. » L’aventure commence, avec un navigateur qu’il ne connaissait pas encore, Guillaume Farsy.

Le calme après la tempête
« Le départ a été compliqué, assure Renaud. C’était dur de sortir du golfe de Gascogne et au Portugal c’était très chaud ! Deux bateaux ont cassé leur mât mais nous on était à fond. Il y avait des vagues plus hautes que notre mât et à un moment on a perdu le contrôle. » Résultat : tangon brisé et voile déchirée.
L’équipage prend la décision de gagner la côte portugaise pour réparer. « Un autre skipper dont le mât avait cassé a accepté de nous donner son tangon, se remémore Renaud. On a fait quinze heures d’escale sans dormir, on a réparé et on est reparti. » Malheureusement, après la tempête, c’est le calme plat et leur bateau n’avance plus.
« On s’est dit qu’il fallait que l’on tente quelque chose, explique le navigateur. On avait des écoles qui nous suivaient, une île qui nous regardait, plein de gens... Alors on a donné tout ce qu’on a pu. » Malgré tous leurs efforts, les deux hommes ne parviennent à décrocher que la 16e place. Mais pour une arrivée inoubliable. « On a reçu un accueil fabuleux », s’émeut encore Renaud. Mais pas uniquement en raison de la chaleur du public.

Deux rêves en une course
Lorsque le bateau officiel vient à la rencontre de Guillaume Farsy et Renaud Nicot, une surprise de taille attend celui-ci. « Quand j’ai passé la ligne d’arrivée, Arnaud est venu jusqu’à nous et quand on a baissé la grand-voile, il m’a passé dans mes bras mon fils né un mois plus tôt. J’étais comme un fou. Je crois que c’était le plus jour de ma vie. J’ai pu accomplir un rêve de ma vie avec la course au large et un autre rêve, tenir mon fils dans mes bras. »
Aujourd’hui, la perspective de se lancer à nouveau dans l’aventure de la Transat lui traverse parfois l’esprit. « Je suis un marin et un coureur mais pas un professionnel, assure-t-il. Donc ça me demandera beaucoup de temps. Pour la préparation physique et celle du bateau, mais aussi pour trouver l’argent. » En attendant ce jour, il a hâte de découvrir le Figaro 3. « En 2018, c’était la dernière sur Figaro 2, donc je suis curieux de voir ces bateaux qui vont plus vite mais sont plus difficiles à naviguer. »
Et peut-être qu’en posant les pieds sur le pont, l’envie de reprendre la mer deviendra irrépressible...

 

Journal de Saint-Barth N°2 du 31/05/2021

Journal de la Transat 2021 numéro 2