Sur le ponton de Concarneau, on avait demandé à Cindy Brin (Cap St Barth) de donner une qualité pour décrire son coéquipier Thomas André. «Son dynamisme, il est toujours à fond, a déclaré sans hésiter la native de l’île. Donc quand moi j’ai un coup de mou, ça me rebooste. » Au fil de l’aventure, les spectateurs de la Transat Paprec ont eux aussi appris à connaître le sourire inébranlable de Thomas : même trempé des pieds à la tête et avec 30 nœuds de vent. Mercredi 30 avril, le Breton se réjouissait de leur place dans le trio de tête : « On est super contents, on ne pensait pas être aussi bien placés, c’est une belle surprise. On montre qu'on sait avancer vite donc forcément l'humeur est plutôt bonne à bord. » Régulièrement, Thomas a partagé le quotidien sur le Figaro 3 Cap Saint-Barth, comme lorsqu’il filmait à son insu sa coéquipière en train de dormir ou lorsqu’il expliquait en quoi consistait le matossage (déplacer les poids sur le bateau pour en optimiser l’équilibre). « J’aimerais pas être à sa place », a commenté le jeune sportif lorsque Cindy appliquait les premiers soins sur sa blessure au pied.
« C’est un bon casse-tête »
Puis pendant deux jours, c’était silence radio. Ni Cindy, ni Thomas n’ont donné de nouvelles entre vendredi et dimanche matin. D’une voix enrouée, le Breton a repris la caméra pour se filmer face à l’ordinateur, en montrant les différents routages possibles : « C'est un bon casse-tête, parce qu'en ce moment, on a une grosse zone de molle. Autant vous dire que ça va resserrer le jeu et qu'on ne sait pas du tout comment ça va finir. » L’incertitude des conditions météorologiques a ébranlé le moral du Breton, ainsi que sa confiance dans ses capacités à choisir la bonne trajectoire : « On a tiré des bords à l’envers cette nuit, notamment un, qui ne nous a pas été favorable du tout. On est carrément déçu par rapport à ça. » L’arrivée dans la zone sans vent a d’autant plus déstabilisé les skippers, impuissants face à une telle situation et contraints d’être dans une position d’attente. « On a hâte que ça se finisse, parce que là c'est trop stressant ! », a soupiré Thomas. Alors qu’ils avaient pris une avance considérable sur les autres concurrents, cette zone de molle les a bloqués dans leur progression et a donc permis au groupe arrière de rattraper leur retard. Une situation difficile à digérer pour les leaders. « À titre personnel, c’était un peu dur à encaisser de savoir qu’on allait de toute façon se faire rattraper, admet Thomas. Maintenant que c’est presque fait, ça va mieux. C’est plus simple d’être de nouveau en mode attaque. »
Ateliers cuisine et ménage
Ce lundi, le Breton avait retrouvé le sourire face à la caméra de Cindy. Les deux skippers de Cap Saint-Barth ont profité de l’accalmie pour faire le ménage. « On s’est dit qu’on allait faire un petit coup de ménage parce que ça sentait la mort dans le bateau, explique Cindy. Dans la famille des sargasses, on cherche les crabes et les poissons morts. » Image à l'appui, la navigatrice filme les animaux marins pris dans les filets du bateau. Les deux skippers ont fini par faire un «pierre-feuille-ciseaux » pour décider lequel d’entre eux finirait le nettoyage. « Bon c'est à mon tour de m'y coller », a conclu Thomas les yeux rieurs. « On n’a pas vraiment eu le temps de se poser depuis le début de la course, et je pense que ça se ressentait dans nos comportements, constate-t-il. Bien sûr, qu’on aurait préféré avoir du vent jusqu’au bout. Mais quoi qu’il en soit, la molle est là et on en profite pour prendre soin de nous ! » Le Breton a sorti pour la première fois de l’aventure le réchaud pour déguster un plat lyophilisé au début de la semaine. « Quand il fait 30 degrés, je fais à manger chaud », a-t-il ironisé en improvisant un accent italien approximatif. Cindy, elle, commence à en avoir assez de se contenter de cacahuètes pour le petit-déjeuner. « J'ai déjà prévu un cheeseburger et une glace vanille pour l'arrivée », glisse la monitrice.
« Le plus beau reste à venir »
Signe que le moral est revenu au beau fixe, Thomas s’est brièvement transformé en journaliste sportif pour commenter la course dont le retournement de situation a fait croire à un nouveau départ: « Bienvenue sur le bateau Cap St-Barth pour ce live du départ de la Transat Paprec 2025. C’est un excellent départ au milieu de l’Atlantique pour une course sympathique de quatre jours environ. Quelques bateaux ont malheureusement pris un peu de retard, mais ce n'est pas grave pour la suite. C'est parti ! » Trêve de plaisanterie, le duo Cap Saint-Barth ne perd pas de vue l’objectif final et attend avec impatience le retour du vent. « Donnez-nous du vent pour qu’on arrive plus vite et surtout avant les autres ! », a imploré Thomas. Les skippers sont dans les starting blocks pour tenter de conserver leur place dans le groupe de tête. «Ça revient fort derrière, on s'accroche et on donne tout pour les 380 derniers milles », a détaillé Cindy. Après une telle aventure, il n’est pas question de baisser les bras. A Saint-Barth, l’équipage Cap Saint-Barth est attendu de pied ferme. Et Cindy en a bien conscience : « Il ne reste plus que quelques jours compliqués à passer, mais le plus beau reste à venir. Peu importe la place d'arrivée, pour moi, la transatlantique est déjà gagnée. »