Début juillet, Arno Apremont et Michaël Delacour, sont (re)partis dans le Grand Nord pour parcourir plus de 100 kilomètres, en Stand-up Paddle, à travers le cercle arctique. Une grosse semaine d’exploration passée debout, à la rame, au milieu des glaciers, de la toundra et de la faune polaire.
Il y a deux années de cela, Arno Apremont avait fait partie d’une expédition similaire (JSB1534), une première mondiale à l’époque. Lorsque l’opportunité de ramer à nouveau au milieu des icebergs s’est présentée, le membre de Sup St Barth n’a pas hésité et pour l’occasion, a emmené dans cette nouvelle aventureson ami Michaël Delacour, également membre du club de paddle de l’île.
Après avoir rallié Copenhague, suivi d’une escale dans la capitale Groenlandaise, Nuuk, c’est finalement au départ du petit village de Oqaatsut et sa trentaine d’habitants, que le convoi de six aventuriers, dont les deux Saint-Barths, et leur guide, Ingrid Ulrich, s’est engagé sur un parcours de plus de 110 km, en direction de la mer de Baffin. « En juillet, la banquise a fondu, la verdure reprend ses droits au milieu des décors de glace, c’est magnifique ! » s’enthousiasme Arno Apremont. S’il est revenu pour l’aventure, le dépaysement et le spectacle, il s’y est encore mieux préparé, pour profiter pleinement, malgré le défi sportif : « J’ai soigné ma préparation avec beaucoup de gainage et d’exercices d’endurance parce que ramer 8 heures par jour, ça fatigue le corps ! » En effet, pas question d’aller à la rencontre des icebergs et des baleines à bosse sans une bonne condition physique : « Il faut s’accrocher, parce qu’au moindre soucis, le seul moyen de communiquer avec le monde, c’est le téléphone satellite, oubliez les smartphones, y’a pas de réseau là-haut », se rappelle, rieur, Michaël Delacour. Bizut du Grand Nord, “Mickey” comme on l’appelle au club, a vécu un grand moment de vie. « On se reconnecte avec la nature, pas de portable, pas de communication avec le monde extérieur... ce silence, cette nature saisissante et brute, ça fait réfléchir sur tous les besoins secondaires qui rythment notre vie mais qui, finalement, sont superflus... ».
Le confort est sommaire mais le plaisir est total, surtout lorsque que l’on rame au milieu d’une dizaine de baleines. « Malgré leur taille hors norme, elles ne font ni bruits, ni vagues quand elles sondent ou qu’elles sortent de l’eau. C’est bluffant de grâce une baleine, faut pas croire… par contre, quand elles soufflent, tout tremble dans un bruit assourdissant », se remémore Mickey, qui a des souvenirs extraordinaires plein la tête : « Pour mes 52 ans, je me suis baigné dans de l’eau à 2°, au milieu des icebergs. J’ai ramé avec des phoques et j’ai pris le temps de contempler des paysages toujours plus époustouflants, en paddle, ou en randonnant... c’est un beau cadeau d’anniversaire ! »
Pôle-Lanta
Les journées d’exploration au large du Groenland sont rythmées par les repas, la rame et les périodes de repos, dans une période où la nuit n’existe pas. « Des jours sans fins, ça fait bizarre au début, seule ta montre te rappelle l’heure qu’il est. Heureusement, Ingrid Ulrich, notre guide, savait bien séquencer les journées pour que nous ne perdions pas trop de repères. Et après une journée de rame, la fatigue aidant, on tombe de sommeil rapidement, malgré le soleil de minuit. » se souvient Michaël Delacour. « Encore une fois, quand on se lance dans un périple comme celui-là, en totale autarcie, on sait que le confort sera minimum. Trempés en permanence, on part avec un paddle gonflable habileté à naviguer en eaux glaciales, deux sacs étanches pour y mettre nos vêtements, nos équipements de nuit, notre tente, les denrées et de quoi réchauffer l’eau des glaciers qu’on va puiser pour vivre. A l’instar des marins ou des militaires, on se nourrit de produits lyophilisés, avec des portions. On a aussi des aliments en poudre et des céréales. Pour agrémenter et relever tout ça, j’ai emmené cette fois-ci des condiments », déclare Arno Apremont qui s’est mué en cuistot du grand froid. « Sur place, on peut aussi pêcher de la morue, des caplans et ramasser d’énormes moules. La saison de l’été s’y prêtant, avec des températures allant de -3° à 25 degrés, les pêches étaient parfois copieuses. » Mais l’environnement hostile, à 300 kilomètres du cercle arctique est bien là. Les deux Saint-Barths et leur petite équipe de riders y ont rencontré les soudains vents catabatiques, issus des fjords, en direction du pôle Nord, particulièrement glaçant. Ces derniers ont mis à l’épreuve leur endurance. « On longe les côtes, il faut faire attention à ne pas percuter les glaciers et suivre les indications indispensables du guide », prévient Mickey.
Un road trip polaire tous les 2 ans
« Bien sûr que je voudrais y retourner ! Dans 2 ans, Ingrid, notre guide, espère partir encore plus au nord, et explorer de nouveaux territoires, j’aimerais y être ! » harangue Arno, désormais habitué aux icebergs. « C’est une performance physique mais c’est surtout un voyage unique dans une vie, avec, quand même un petit budget à prévoir, car les places sont limitées » précise Michaël . Revenus sur l’île depuis leur road trip glacier de l’été, les deux quinquagénaires, en pleine forme, continuent d’user leur paddle dans le cul de sac marin, avec leur club du Sup St Barth, en conseillant, à qui veut l’entendre, que ramer dans le grand froid, ça doit se vivre une fois.