Saint-Barth - Don du sang en 2003

Don du sang en 2003 ©Archive JSB

Pourquoi il est impossible de donner son sang dans les Îles du Nord

Dans toute la France les stocks de sang manquent, y compris dans les Antilles. Depuis 2012, il est impossible de donner son sang à Saint-Barthélemy. Avant cela des collectes ponctuelles rencontraient un large succès. 

«Lundi 7 septembre, seules cinq poches de sang ont été prélevées, alors que 50 sont nécessaires chaque jour pour répondre à la demande des deux régions Guadeloupe-Guyane ! » alerte l’EFS régional, relayé par la préfecture de Guadeloupe. Comme dans l’ensemble de la France, les stocks de sang sont très faibles, de quoi inquiéter les professionnels de santé.
Entre le confinement, la poursuite de l’épidémie de coronavirus et les vacances d’été, les donneurs ne se déplacent plus depuis des mois.

A Saint-Barthélemy, depuis 2012, on ne peut plus donner son sang. Avant cela, des collectes ponctuelles étaient organisées conjointement par l’EFS Guadeloupe et le Lions Club de Saint-Barthélemy. Avec succès : sur un week-end, près de 200 poches de sang pouvaient être collectées sur notre île ; c’est énorme au regard du nombre d’habitants.
Notre île se distinguait également par une forte concentration de groupes sanguins O négatif : 10% des donneurs en 2005, contre 6% pour la population française dans son ensemble. Le sang O négatif est le plus recherché, puisqu’il est universel.

Pas infaisable
mais compliqué

Malgré ces bons résultats, ces opérations de collecte de sang ont cessé il y a plus de dix ans. « C’était une activité importante du Lions Club à l’époque, mais il y avait trop de problèmes de transport », explique Jean-Jacques Rigaud, président du Lions Club Saint-Barthélemy. « On serait bien sûr prêts à s’y remettre si c’était possible. »

« Ce n’est pas infaisable, et nous ne sommes pas fermés. En tant qu’EFS on n’aime pas avoir des territoires qui ne sont pas collectés, comme Saint-Barth et Saint-Martin, d’autant que le don du sang profite à tous », admet Mireille Bordenet, responsable des prélèvements à l’EFS Guadeloupe Guyane. « Mais entre le matériel, les problèmes d’acheminement du sang et l’hébergement, c’est très compliqué. On a déjà des difficultés sur Marie-Galante, qu’on vient de relancer… »

Pour accueillir les donneurs de Saint-Barthélemy, l’EFS acheminait du matériel à l’avance, par bateau, sur notre île (couchettes, appareils, etc.) Ensuite l’équipe arrivait, et le Lions Club offrait les repas et l’hébergement. Jusque-là, c’est réalisable. Mais les dizaines de poches collectées doivent être transportées dans un délai et des conditions de conservation très strictes. Il a pu arriver que le stock de sang prélevé à Saint-Barthélemy reste un peu trop longtemps à attendre l’embarquement sur le tarmac, en plein soleil, le rendant inutilisable… « Un jour, le pilote d’avion, qui a toute latitude sur la marchandise qu’il transporte, a refusé d’embarquer le sang car il était Témoin de Jéhovah ! On rencontre régulièrement ce genre de difficultés. Une autre fois, on devait faire venir des plaquettes de sang depuis la métropole. A Orly, le pilote qui manquait de place a hésité, et il a préféré embarquer une caisse de poussins vivants... »

Les épidémies de Zika et du Chikungunya ont également pénalisé l’EFS Guadeloupe. En ce moment, c’est la dengue qui fait rage, particulièrement sur notre île. « Mais la dengue ce n’est pas un problème pour nous, car elle est endémique de nos îles. En revanche, en métropole, ils ne prélèveront pas quelqu’un qui arrive des Antilles sans respecter un délai de 28 jours. »

Si les difficultés sont nombreuses pour Saint-Barthélemy, elles le sont encore davantage pour la Guyane. Comme dans toute l’Amérique du Sud, il circule là-bas la maladie de Chagas. Sa prégnance a provoqué la fermeture de l’antenne guyanaise de l’EFS, tout étant centralisé à Pointe-à-Pitre. « C’est aussi un projet, encore plus complexe que les Îles du Nord, mais intéressant car leur sang a des particularités peu répandues. »

Pour en revenir à Saint-Barthélemy, « je ne veux pas donner d’espoir ni de date », regrette Mireille Bordenet. « Mais il faut qu’on y retourne, c’est d’ailleurs une volonté de notre président. » Il y a quelques mois, le projet avait effectivement été remis sur la table à l’EFS. L’épidémie de Covid-19 l’a avorté.

Journal de Saint-Barth N°1391 du 30/09/2020

Micheline Jacques sénatrice
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Don du sang