Saint-Barth -

Thalia Gréaux veut goûter aux saveurs du documentaire

La fin de l’après-midi approche et la chaleur se fait moins pesante. Particulièrement sur les quais du musée territorial du Wall House, lieu de rendez-vous pour les parents et leurs enfants. Des « minuscules » rieurs qui courent, crient, roulent sur vélos et trottinettes, jouent. Ils aiment aussi à s’aventurer dans le musée pour y goûter un brin de fraîcheur et perturber l’ambiance ouatée des lieux. D’ordinaire, c’est le directeur qui, derrière ses petites lunettes, les accueille d’un regard amusé et d’une remarque bienveillante. Mais en l’absence de Charles Moreau, c’est une étudiante revenue au pays qui siège derrière le bureau installé à l’entrée du musée. Elle a pour nom ­Thalia Gréaux. Du haut de ses vingt ans, c’est parée d’une contagieuse bonne humeur qu’elle effectue ce « job » de vacances. Une courte pause sur son île avant de repartir pour Cork, en Irlande, où elle étudie depuis près de neuf ans.


« On a dû partir »
« J’ai grandi à Saint-Barthélemy jusqu’à mes dix ans, raconte l’étudiante. J’étais à l’école à Saint-Joseph, à Lorient, et puis une année au Cned (Centre national d’enseignement à distance) aussi. » En 2015, son père, Frantz, est victime d’un accident du travail. « On a dû partir, se souvient Thalia. On est allé dans le Sud, à Montpellier. » Mais pour peu de temps car Youli, sa maman, a d’autres plans en tête. « Elle voulait que l’on parle anglais, alors elle nous a emmené en Irlande, mon frère et moi, sourit Thalia. Avec mes grands-parents aussi. Elle leur a dit de venir avec nous ! »
Au départ, il ne doit s’agir que d’un séjour d’une année. «Mais on est resté plus longtemps, s’amuse l’étudiante. On a gardé la maison jusqu’à mes vingt ans. J’étais toute petite, on vivait dans un pays différent mais on allait voir papa à toutes les vacances. Ma mère ne voulait pas nous laisser seuls. Et puis mon frère voulait aussi rester. » Son frère, Yago, brillant étudiant dont le Journal de Saint-Barth a déjà parlé (JSB 1595) et qui, après trois années passées à Maastricht à étudier le droit européen, va revenir en Irlande (à Dublin) pour y obtenir son Master.

L’éloignement familial
Pour Thalia, la vie à Cork a changé depuis un an. « Maintenant, je suis toute seule, j’ai mon indépendance, lance-t-elle avec assurance. J’y ai mes amis depuis longtemps. » Et puis elle a intégré l’université pour y suivre des études de photographie et de vidéographie. « Petite, j’ai appris la photo avec mon grand-père, j’aimais beaucoup, donc ça m’a paru normal de me tourner vers quelque chose d’artistique. » De plus, elle ne cache pas son attrait pour « tout ce qui est culinaire ». Encore une passion qui lui vient de son grand-père, Max, qui était cuisinier. « Ça vient peut-être de là », glisse-t-elle innocemment. La famille occupe, d’évidence, une place importante dans la vie de la jeune femme. Même si elle sait que ses envies de voyage, pour y tourner des documentaires, l’éloignera régulièrement des siens. « Quand on quitte un endroit jeune, souvent on a envie d’en voir encore plus, sourit-elle. Nos parents nous ont un peu élevés comme ça. Ma mère dit parfois qu’elle sait que l’on ne vivra pas près d’eux. Elle le sait, mais elle le dit quand même en pleurant. » Fort heureusement, pour Thalia, Saint-Barth n’est jamais vraiment loin.

Une « petite mamie »
« Je ne reviens pas très souvent, confesse l’étudiante. Pour les vacances d’été, la plupart du temps. Je retrouve des amis d’enfance avec qui j’ai repris contact. Et puis il y a la famille. Mes grands-parents paternels habitent sur l’île. Ma grand-mère maternelle est repartie en France. » Thalia se voit donc tiraillée entre trois pays, trois cultures. « En Irlande, il pleut beaucoup mais les gens sont très accueillants, assure-t-elle. Bon, comme partout, les enfants sont méchants en école secondaire. Ils me disaient parfois de rentrer chez moi. C’était difficile. Mais aujourd’hui, je me considère un peu comme un mélange des trois : Saint-Barthélemy, la France et l’Irlande. »
A vingt ans, s’occuper du musée du Wall House, même s’il s’agit d’un « job » de vacances, doit lui paraître bien terne à côté de la trépidante vie estudiantine. « Je suis une petite mamie, lance-t-elle en riant. Cork, c’est une ville tranquille. C’est la deuxième plus grande d’Irlande, mais il y a trois rues ! » Le risque de se perdre dans ses études est donc mince. Un jour, sans doute, un documentaire sur une contrée lointaine et ses spécialités culinaires sera diffusé. Avec, sous le nom de la réalisatrice, celui de Thalia Gréaux, la plus Irlandaise des enfants voyageuses de Saint-Barth.
 

Journal de Saint-Barth N°1624 du 17/07/2025

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