Saint-Barth - élections législatives Frantz Gumbs et Daniel Gibbs

Frantz Gumbs et Daniel Gibbs sont opposés ce samedi lors du second tour des élections législatives à Saint-Barthélemy et Saint-Martin, une circonscription unique qui ne dispose donc que d’un député.

Gumbs contre Gibbs, un duel « présidentiel »

Les deux anciens présidents de la Collectivité de Saint-Martin sont opposés ce samedi 18 juin pour le second tour des élections législatives dans les îles du Nord. Les 24.563 électeurs inscrits sur les listes sont attendus de 8 à 18 heures dans les bureaux de vote pour les départager et désigner celui qui les représentera jusqu’en 2027 à l’Assemblée nationale.

Dès les premières minutes du dépouillement, samedi dernier, il est apparu que le résultat du premier tour des élections législatives ne ferait guère de doute. Dans sa composition comme dans ses proportions. Ainsi, le résultat final ne relève pas véritablement de la surprise. Ce samedi 18 juin, ce sont deux anciens présidents de la Collectivité de Saint-Martin, Frantz Gumbs et Daniel Gibbs, que les électeurs des Iles du Nord vont devoir départager. Car, faut-il encore le rappeler, Saint-Barthélemy et Saint-Martin sont réunies en une seule et même circonscription. Elles disposent donc d’un député commun pour les représenter à l’Assemblée nationale.

Le soutien de La République en Marche
Lors du premier tour, Frantz Gumbs a recueilli 2.383 voix (313 à Saint-Barth), soit 47,09% des suffrages exprimés. Il a donc survolé le scrutin, malgré une campagne électorale des plus discrètes. A tout le moins à Saint-Barth où il n’a manifestement pas jugé nécessaire de gaspiller de l’énergie. Sans doute a-t-il estimé que la présence à ses côtés de Mélissa Lake, conseillère territoriale de la majorité, conjuguée au soutien du président Xavier Lédée, tardif mais appuyé (lire par ailleurs), lui suffiraient pour glaner quelques voix. Au lendemain du premier tour, rien ne semblait indiquer qu’il entendait changer de stratégie avant le vote de ce samedi 18 juin. Toutefois, le fait qu’il ait été devancé par Daniel Gibbs à Saint-Barth ne peut être ignoré. Même si la poignée de votes supplémentaires obtenus par l’ancien député (de 2012 à 2017) s’avère négligeable (321 contre 313).
Quoi qu’il en soit, Frantz Gumbs s’est déclaré « satisfait » du résultat. Il a également dévoilé le fait qu’il a obtenu le soutien du parti du président de la République, Emmanuel Macron, baptisé  “Ensemble” (anciennement La République En Marche). Il estime toutefois qu’il ne doit son succès du premier tour qu’au «Rassemblement Saint-Martinois - Alternatives », le parti de la majorité territoriale de Saint-Martin. « Je ne suis pas anti-Macron mais mon positionnement politique est centre-droit et, si je suis élu, je garderai mon indépendance », assure-t-il. Il s’agirait donc d’un soutien sans engagement pour “Ensemble”. Comme pour asseoir une majorité factice dans les rangs de l’Assemblée ?

Daniel Gibbs retrouve Les Républicains
Pour Daniel Gibbs, la situation n’est pas vraiment beaucoup plus claire. Au premier tour, il n’a pas été investi par « son » parti, Les Républicains. Comme l’exigent les statuts, c’est la candidate sortante, Claire Javois Guion-Firmin, qui en a bénéficié. Sans grand succès. Par conséquent, c’est bien étiqueté « Les Républicains » que Daniel Gibbs se présentera au deuxième tour le 18 juin, après avoir obtenu 1.398 voix, soit 27,62% des suffrages exprimés.
Dans l’entre-deux-tours, il a reçu un soutien quelque peu inattendu par le biais d’un communiqué de Clément Borioli, le délégué des Iles du Nord de “Reconquête”, le mouvement du candidat d’extrême droite aux multiples échecs électoraux, Eric Zemmour. Un soutien qui prend la forme d’un appel à « faire barrage » à Frantz Gumbs. Ou plutôt à Emmanuel Macron. « Ce qu'il ne dit pas à ses électeurs, c'est qu'il va soutenir, pour les cinq années à venir, la politique de Monsieur Macron à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin, écrit le représentant de “Reconquête”. Cette politique, vous en avez déjà été les victimes. » Mais il ne s’agit pas du seul appui sur lequel Daniel Gibbs peut se reposer.
En effet, à Saint-Barth, le groupe territorial d’opposition Saint-Barth d’Abord s’est affiché aux côtés du candidat Gibbs et de son suppléant, Thomas Gréaux, l’actuel président de la Chambre économique multiprofessionnelle (Cem). Un soutien renouvelé en début de semaine par le chef de file de Saint-Barth d’Abord, Romaric Magras, qui déclare : « Daniel Gibbs a été un député utile et présent à St Barth. Son expérience permettra de faire avancer les dossiers essentiels comme la santé et l'éducation. Alors oui, ce samedi 18 juin, il faut voter Daniel Gibbs et Thomas Gréaux. » Et l’élu territorial d’opposition de lancer une pique en direction de Frantz Gumbs et de ses soutiens : «Personne ne peut préjuger de ce que fera Frantz Gumbs, qui sait s’il ne sera pas le Claire Javois de la nouvelle majorité ! » Une référence un tantinet vacharde à l’invisibilité de la députée sortante lors des cinq dernières années. Sans préciser, toutefois, que celle-ci avait été adoubée en 2017 par le président de la Collectivité de Saint-Barth, Bruno Magras. Donc par le groupe Saint-Barth d’Abord.
Quoi qu’il en soit, pour Daniel Gibbs, le défi de ce deuxième tour sera de parvenir à mobiliser les électeurs. Car, à la vue du taux d’abstention (78,25%), il ne fait aucun doute que de nombreuses voix sont à conquérir. « Je m’attacherai à faire ce qui est possible, toujours dans le respect des règles, pour que la démocratie s’exprime plus largement sur nos deux îles pour le second tour », a ainsi affirmé Daniel Gibbs dans un communiqué.
Lorsque cette édition paraîtra, il ne restera que quelques heures aux candidats et à leur suppléant pour convaincre la population des îles du Nord de se déplacer samedi dans les bureaux de vote. Pas une mince affaire.

Une abstention embarrassante

Pour ces élections législatives, Saint-Barthélemy et Saint-Martin ont enregistré le taux de participation le plus faible des territoires d’Outre-mer avec 21,25%. Samedi dernier, seuls 5.219 des 24.563 électeurs des îles du Nord se sont déplacés dans les bureaux de vote (5 à Saint-Barth, 19 à Saint-Martin). Sur ces 5.219 votes, 5.061 ont été comptabilisés comme « exprimés ». à titre de comparaison, le taux de participation a été de 25,31% en Guadeloupe, de 21,37% en Martinique et de 22,84% en Guyane. A Saint-Barthélemy, le pourcentage de votants est inférieur à celui de Saint-Martin (18,24% contre 22,08%). Une première.
Pour Frantz Gumbs et Daniel Gibbs, qualifiés pour le second tour après avoir respectivement glané 2.383 et 1.398 voix, il reste donc 19.344 bulletins à aller chercher avant le vote de ce samedi 18 juin. Une mission qui semble toutefois quasi impossible, compte tenu du peu d’intérêt que la population des deux îles porte à ce scrutin. Ce qui s’avère quelque peu embarrassant pour le futur député qui pourrait ainsi être envoyé sur les bancs de l’Assemblée nationale par seulement un cinquième des électeurs de sa circonscription.

 

Abstention : un « effet Javois » ?

Candidats et observateurs cherchent depuis dimanche dernier des explications au taux d’abstention record qui a été enregistré à Saint-Barthélemy et Saint-Martin lors du premier tour des élections législatives. Désintérêt pour un scrutin qui intervient après les territoriales et la présidentielle, perte de confiance en l’institution, flemme à se mobiliser un samedi... Aucune ne semble pouvoir justifier le fait que plus de 19.000 électeurs ont choisi de ne pas se déplacer samedi 11 juin dans les bureaux de vote. Une autre hypothèse a été régulièrement évoquée : celle d’une mandature fantomatique de Claire Javois Guion-Firmin. En effet, son peu de communication tout au long de ses cinq années de mandat conjugué à une présence erratique dans les Iles du Nord peuvent effectivement avoir provoqué un sentiment d’inutilité de la fonction de député dans l’esprit des électeurs de Saint-Barth et Saint-Martin. Reste à savoir si ces derniers vont revenir ce samedi 18 juin à de meilleurs sentiments et se présenter devant les urnes pour élire leur représentant à l’Assemblée nationale.

 

 

Frantz Gumbs, L’homme des présidents
Agé de 68 ans, retraité et désormais deuxième vice-président à la Collectivité de Saint-Martin, Frantz Gumbs s’est précédemment retrouvé à la tête de celle-ci. C’était en 2008, suite à la démission de Louis-Constant Fleming. Son élection comme président avait toutefois été annulée par le Conseil d’Etat mais il a été élu une deuxième fois par le conseil en 2009. Il a dirigé la Collectivité jusqu’en 2012. Pour ces législatives, il a reçu le soutien de « son » président, Louis Mussington, mais aussi celui de Xavier Lédée. « Frantz est un homme de valeur et son CV parle pour lui, affirme le président de la Collectivité de Saint-Barthélemy. Enseignant puis proviseur d'établissement scolaire au service des jeunes, président de la Collectivité de Saint-Martin, il reste fidèle à ses valeurs et je suis convaincu qu'il portera aussi bien le message de Saint-Martin que de Saint-Barth à l'Assemblée nationale. » Sa suppléante est Mélissa Lake, âgée de 43 ans et présidente de société à Saint-Barth.

Daniel Gibbs, Pour rester dans le « jeu » politique
Premier député de la circonscription unique de Saint-Barth et Saint-Martin entre 2012 et 2017, Daniel Gibbs a ensuite présidé la Collectivité de Saint-Martin de 2017 à 2022. Candidat à sa propre succession, il a été évincé par les électeurs qui lui ont préféré Louis Mussington. Agé de 54 ans, ancien notaire, Daniel Gibbs s’est donc lancé dans la campagne des législatives après ce revers aux territoriales. « Homme d’engagement, de parole, doté d’une forte capacité de travail, j’ai acquis l’expérience des institutions nationales et la connaissance des atouts de nos territoires, de leurs défis et de leurs aspirations économiques, sociales et identitaires », assure le candidat. Son suppléant est Thomas Gréaux, le président de la Chambre économique multiprofessionnelle de Saint-Barth. Ingénieur BTP, âgé de 30 ans, il effectue ses premiers pas en politique.

 

Elles ont dit...

Claire Javois Guion-Firmin :
 « Les résultats des législatives sont décevants et j’en tire toutes les leçons. Je voudrais adresser tous mes remerciements aux électeurs qui m’ont apporté leur suffrage. J’aimerais également remercier mon équipe pour son implication qui m’a fait chaud au cœur. Merci aux personnes dans les quartiers avec qui nous avons échangé. Merci enfin à ­Sylviane Judith, ma suppléante. J’invite tous les électeurs de nos îles à aller voter aux second tour. Il est important que notre futur parlementaire soit bien élu. »

Sabrina Rivere Bonzom :
« Je suis particulièrement touchée et ravie de cette confiance que vous m’accordez. Pour une première présentation à des élections, en mon nom propre, sur cette terre d’accueil, c’est pour moi un bilan encourageant. Je continuerai à me mettre au service de nos territoires à travers mes engagements associatifs et professionnels. J’invite aussi les électeurs à se mobiliser au second tour, libres et en leur âme et conscience, pour ne pas laisser l’abstention parler pour eux. »

 

Journal de Saint-Barth N°1477 du 16/06/2022

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