Saint-Barth - Xavier Lédée & Bruno Magras Elections territoriale

©Ed Gudenas

Bruno Magras interpelle Xavier Lédée sur la « crise » des pêcheurs

Dans un long courrier daté du 28 novembre, l’ancien président de la Collectivité territoriale répond à la tribune publiée par son successeur dans la Gazette de la Collectivité et sur les réseaux sociaux. Il lui signifie son mécontentement face à la stratégie supposée de la nouvelle majorité qui consiste à dénigrer l’ancienne gouvernance. Bruno Magras estime que cette méthode, particulièrement en ce qui concerne la situation des pêcheurs, « ne relève pas de l'ingratitude mais de la malhonnêteté pure et simple ». Voici le courrier dans son intégralité.  

« Monsieur le président,
Voilà bientôt huit mois que je me suis retiré de la scène politique. Connaissant les difficultés de votre fonction, je ne souhaitais pas en rajouter et ce, malgré la stratégie de plus en plus évidente, qui consiste à rejeter sur l'ex-majorité, les insuffisances de la nouvelle.
Malheureusement, à la lecture du communiqué que vous avez diffusé sur  les réseaux sociaux le mardi 21 novembre, faisant état des accords que vous avez conclus avec les pêcheurs, je me vois contraint de sortir de mon silence.
Je découvre en effet, que vous vous faites le porte-parole de ceux qui selon vous, déplorent le fait de ne pas avoir été considérés depuis le passage de l'île en Collectivité en 2007 et qui auraient été soi-disant, victimes de promesses non tenues ! Il s’agit là, de propos que je ressens comme une insulte inacceptable.
Monsieur le président, ou cours des vingt dernières années, les quelques 50 pêcheurs de Saint-Barthélemy, représentent la catégorie professionnelle qui à le plus largement bénéficié des investissements réalisés par la Collectivité.
En effet :
• Début 2003, une halle aux poissons fut construite et mise à leur disposition gratuitement, toutes charges comprises.
• Une réduction de 50% du tarif tant à quai qu’au mouillage dans le port de plaisance leur fut accordée.
• Depuis le mois d’avril 2011, après de longues négociations, la Collectivité est devenue propriétaire de la route avec parking, qui mène à la plage de Grand-Cul-de-Sac. Un ponton y a été construit pour les pêcheurs du secteur au vent. ll a d’ailleurs été récemment rénové.
•  Le dragage du chenal de navigation a été effectué chaque fois que nécessaire.
• Décembre 2017, la Collectivité a fait l’acquisition de l’ex-propriété Rockefeller (2049 m2) à Gustavia, pour la somme de 10 millions d'euros. Cette propriété fut affectée à la construction d'une nouvelle halle aux poissons avec parkings gratuits tant pour les pêcheurs que pour leurs clients. Le tout évolué à plus d'un million d'euros.
• Plus de 2,4 millions d'euros ont été investis pour reconstruire  le front de mer de l'ex-quai Rockefeller. A peine terminé, celui-ci fut mis à disposition de 14 bateaux de pêcheurs.
• Après un long travail, amorcé sous l'autorité de Madame Nadège Carty-Sinan, ex-directrice de la CEM, un Comité des pêches fut enfin concrétisé dans le courant de l’année dernière. La Collectivité, s'est engagée à apporter 50% de son budget de fonctionnement. C’est d’ailleurs la seule promesse que je reconnais avoir faite aux pêcheurs.
S'entendre dire aujourd'hui, que ces derniers n’auraient pas été considérés par l'ex-majorité, ne relève pas de l'ingratitude mais de la malhonnêteté pure et simple.
La pêche est certes, un métier difficile. Je l’affirme en connaissance de cause pour l'avoir pratiqué dans ma jeunesse. Mais c'est un choix de vie. Je sais aussi que contrairement aux autres gros consommateurs de carburant, lorsqu'un pêcheur fait le plein de ses réservoirs pour partir en mer, il n’a aucune garantie de résultat. Dès lors, il est naturel qu'il puisse bénéficier d'un prix préférentiel. Par conséquent, bien que n’étant pas un partisan de l’économie subventionnée, je me réjouis que vous ayez pu obtenir de la société Rubis - qui soit dit en passant, possède 70% des parts de la Sara- une réduction du prix du litre en faveur des pêcheurs puisque comme vous le savez, c'est à partir du jour où notre île fut approvisionnée par la Sara que les prix ont flambé à la pompe et que le différentiel avec Saint-Martin, - qui n'est pas approvisionné par la Sara - s'est totalement déséquilibré. Par conséquent, je souhaite ardemment, que les engagements qui ont été pris par ces deux sociétés soient pérennisés.
Enfin, pour conclure, je dois quand même vous avouer en toute sincérité que cette stratégie qui consiste à vouloir dissimuler ses propres faiblesses en rejetant la responsabilité de ses échecs sur ses prédécesseurs commence sérieusement à m’agacer. Je tenais à vous en informer par écrit, en espérant que vous saurez y remédier.
Dans cette attente, je vous prie de croire, Monsieur le président, à l’expression de mes respectueuses salutations.

Bruno Magras »

 

Le communiqué du président de la Collectivité, Xavier Lédée

 

« Ce lundi, un blocage du port de Gustavia a été mis en place par un collectif de pêcheurs d’une vingtaine de bateaux. Le principal motif de ce blocage était le prix élevé du litre d’essence et la volonté de voir ce prix fixé à 1euros.

Avant même ce blocage, le travail était en cours depuis des mois avec déjà des avancées sur le sujet. C’était d’ailleurs pour moi tout le paradoxe de ce blocage : faire face à des pêcheurs qui tout en bloquant l’entrée du port, reconnaissaient le travail entrepris depuis 7 mois et s’en félicitaient tout en déplorant le sentiment de n’avoir pas été considérés depuis le passage en Collectivité, le fait que l’essence ne soit plus aussi accessible à St Martin, et le manque de poissons lors des sorties de ces dernières semaines, autant d’éléments qui ne sont pas du ressort de la nouvelle majorité, combien même ils sont recevables. 

Cette accumulation a généré une impatience devant les résultats alors même que de nouvelles avancées arrivaient indépendamment du mouvement de cette semaine :  

  • ?     Le 16 novembre, une baisse de 17 cts résultant de la réduction de la remise d’Etat sur les carburants. Celle-ci était applicable au 22 Novembre et la Collectivité en a été informée par la Sara la veille comme il est de coutume lors de modifications sur la structure des prix.
  • ?     Le 18 novembre, la confirmation par la préfecture, suite au travail effectué par Maxime Desouches ces dernières semaines, qu’une diminution de 13 centimes sur la marge commerciale était possible dès lors que des volumes suffisants étaient achetés. Ainsi, en travaillant sur l’approvisionnement en carburant des pêcheurs par le biais du Comité des Pêches, cette marge de manœuvre aurait pu être mise en place dès hier et elle l’a été dès la levée du blocage. 
  •  
  • Ces 2 éléments indépendants du blocage sont ceux permettent aujourd’hui d’arriver à ce tarif de 1€13 à la pompe sans toucher à l'équilibre du code des contributions.
  • La revendication étant de 1€, j’ai expliqué aux pêcheurs pendant toute cette période de tension pourquoi la Collectivité ne pouvait ni proposer ce prix, ni s’engager sur l’avenir et sur un gel du tarif. Si les échanges ont été âpres, parfois vifs, nous avons réussi à nous entendre sur le fait que ce n’était pas la meilleure direction à prendre. 
  • En revanche, nous avons des marges de manœuvre sur lesquelles nous devons travailler et c’est ce que je me suis engagé à faire d’ici le vote du budget 2023, dans la continuité du travail en cours.
  • Nous avons estimé à 91.000€ la somme équivalent à ce delta de 13 centimes. Nous trouverons cette somme en négociant avec la SARA, avec Rubi, avec l’Etat mais aussi avec les services de la Collectivité et les pêcheurs eux-mêmes en analysant l’ensemble de leur fonctionnement pour repérer ce qui doit être amélioré et ce sur quoi nous pouvons avancer ensemble. 

En parallèle, certains éléments comme l’amélioration des pompes sur le port de commerce ont été confirmés, de manière concrète, les pêcheurs sentant le besoin d’être rassurés, car ayant souvent entendu des promesses qui ne se sont jamais concrétisées. 

Je redis ici que le blocage n’est pas la bonne méthode et n’est pas une façon de faire acceptable. La communication doit rester au cœur de nos priorités, même si comme tout le monde, nous ne sommes pas parfaits. Il est évident qu’avec une meilleure qualité d’échange, la confiance en la nouvelle équipe aurait pu être meilleure, d’autant que des résultats concrets avaient été obtenus, d’autres étant imminents.?Je dois aussi dire qu’à mon niveau, si les échanges ont parfois été virils, ils sont également restés corrects et concentrés sur le concret de la situation des marins pêcheurs. D’une manière générale, le mouvement, bien qu’illégal, n’a d’ailleurs pas connu les débordements souvent liés à ces blocages, population et pêcheurs ayant su rester « raisonnables ».?Certains trouveront que le ton des dernières revendications ne manifestait pas une volonté de coopération. Peut-être. Mais le fond me semblait bien plus important que la forme. Il n’était pas ici question pour moi de savoir qui étaient les gentils et qui étaient les méchants. Il s’agissait avant tout de trouver une sortie juste, de s’assurer que l’économie ne soit pas davantage pénalisée à 2 jours des fêtes de Thanksgiving et que les déplacements vers St Martin (en particulier les déplacements médicaux) ne soient pas bloqués plus longtemps. »

Journal de Saint-Barth N°1496 du 01/12/2022

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