Les tortues de terre ont colonisé Saint-Barthélemy. Originaires d’Amérique du Sud, elles sont en voie de disparition sur leur terre natale. L’ATE a effectué cette année une tentative de comptage.
Pas besoin d’être scientifique pour constater au quotidien la forte densité des tortues de terre, dites molokoï, à Saint-Barthélemy. Ces animaux placides ont été importés d’Amérique du Sud, et depuis deux décennies ils se multiplient à vitesse grand V. Il est très difficile de se faire une idée de leur nombre. Un stagiaire de l’Agence territoriale de l’environnement, Théo Fines, s’est attelé à cette tâche cette année. Sur une zone de 2,2 hectares à Grand Fond, à raison de 2 heures par jour durant cinq jours, il a procédé à une campagne CMR (capture-marquage-recapture), la même technique que pour le comptage des iguanes. Il a ainsi dénombré 175 tortues charbonnières sur ce secteur. Difficile d’extrapoler ce chiffre à l’ensemble de l’île, les populations de tortues étant variables selon les secteurs et selon les points de nourrissage/abreuvoirs installés par des particuliers. De même l’impact éventuel des tortues de terre sur la biodiversité locale est compliqué à mesurer. Elles mangent de tout (végétaux, invertébrés, escargots, etc.) et sont même cannibales. Mais tout ce qui prolifère démesurément a de toute façon un impact. La forte présence de ces tortues implique également un risque sur la circulation routière, autant que pour les animaux eux-mêmes, régulièrement percutés.
En 2009, un spécialiste des tortues charbonnières, Bernard Deveaux, venu sur l’île en réponse à l’invitation de France Arnaudo (plus connue sous le nom de Madame Tortue), assurait que notre île comportait la plus forte densité de ces reptiles dans les Caraïbes. Il estimait alors «entre 50 à 100, le nombre de tortues à l’hectare pour une population totale de plusieurs milliers. Nous avons par ailleurs observé de nombreux juvéniles, ce qui indique que c’est une population qui se régénère et ne semble donc pas en voie de disparition. »
« Ce qui est frustrant, c’est que dans leur région d’origine, dans le Nord de l’Amérique du Sud, elles sont en danger d’extinction », indique Sébastien Gréaux, directeur de l’ATE. En octobre 2019, le président Bruno Magras avait évoqué publiquement l’idée d’envoyer voire de vendre nos tortues de terre dans ces régions, pour endiguer leur prolifération. « Des discussions sont en cours » avec les zones géographiques concernées, assurait alors Micheline Jacques, vice-présidente de charge de l’environnement (JSB 1345). Pour l’instant, aucune ébauche de projet n’a vu le jour, et la question des tortues n’est pas jugée prioritaire pour la préservation de la biodiversité de Saint-Barthélemy : les chats sauvages et les chèvres errantes ont un impact bien plus néfaste.
Au niveau international les molokoï sont classées espèce vulnérable.