Saint-Barth - 1625-Sargasses Anse Cayes

De longues réflexions mais pas de solutions

La problématique des échouements de sargasses ne date pas d’hier. Depuis 2011, les algues brunes s’invitent régulièrement sur les côtes des îles caribéennes. Avec une intensité qui ne cesse de croître depuis quelques années. Il suffit d’effectuer une rapide plongée dans les archives du Journal de Saint-Barth pour s’en apercevoir.

Bruno Magras : « Une lente asphyxie »
En octobre 2018, le président de la Collectivité territoriale, Bruno Magras, participe en Martinique à un séminaire régional sur les sargasses (JSB 1298). « A moyen et long terme, si aucune solution viable n’est trouvée, et que le phénomène se maintient ou pire, s’aggrave, nos territoires sont tout simplement menacés d’une lente asphyxie économique, financière, environnementale et sanitaire », prédit-il. A Saint-Barth, la stratégie de lutte se confine alors au ramassage des algues échouées. Sur ce point, rien n'a changé en 2025.
En 2017, la Collectivité avait dépensé plus d’un million d’euros pour les opérations de ramassage. Le budget était de 1,7 million en 2024. Cette année, la seule mobilisation organisée fin juin pendant cinq jours a coûté plus de 1,1 million à la Collectivité.
En 2018, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) et le CNRS (centre national de la recherche scientifique) ont été missionnés pour effectuer une étude sur les sargasses. Dans le même temps, un «plan sargasses » avait été lancé par Emmanuel Macron et le ministre de la transition écologique, Nicolas Hulot.

Un barrage flottant ? Oui, mais non
Localement, en décembre 2018, la Collectivité annonce qu’un barrage flottant sera testé à Marigot. Un dispositif qui ne fera même pas l’objet d’un essai. Plusieurs entreprises spécialisées sont consultées. De l’emploi de barrages flottants linéaires à l’utilisation d’un Sargator (embarcation qui ramassage les algues en mer), tout est envisagé. « Le barrage ne se suffit pas à lui-même, constate alors Sophie Durand-Olivaud, directrice des services techniques. En général, 20% des sargasses passent au travers en eau calme donc il faudrait, éventuellement, un bateau pour collecter les algues derrière. » Les courants posent aussi problème, comme les capacités de stockage sur terre. Or, déjà à l’époque, solliciter des barges d’évacuation n’est pas une mince affaire. Quoi qu’il en soit, face aux incertitudes liées à l’efficacité des solutions alternatives, c’est le ramassage après échouage qui se perpétue.
En 2022, le Conseil économique, social, culturel et environnemental (CESCE) se fend d’une étude dans laquelle il préconise d’organiser le ramassage avant les échouements. Par le biais de barrages proches des côtes afin de dévier la trajectoire des nappes de sargasses. Une méthode qui n’exclura toutefois ni le ramassage ni la collecte des algues.

De « réflexions » en comités de pilotage
Depuis 2022, l’entrée en fonction du président Xavier Lédée et de la nouvelle gouvernance, la situation n’a guère évolué. Des réunions, des arrêtés pour interdire la baignade dans les baies envahies par les sargasses (toujours les mêmes : Marigot, Petit et Grand-Cul-de-Sac, Anse des Cayes…), des études en cours ou en devenir sur des solutions pour endiguer le problème mais, pour l’heure, seul le ramassage est privilégié.
En février 2023, le comité de pilotage (Copil) de lutte contre les sargasses est organisé sous la présidence du ministère des Outre-mer. Un plan national de 26 mesures « pour mieux connaître, prévenir et lutter contre ce phénomène » vient s’ajouter au comité de lutte contre les sargasses créé en septembre 2022 à Saint-Barthélemy. Marie-Angèle Aubin, vice-présidente de la Collectivité chargée des dossiers environnementaux (et présidente de l’Agence territoriale de l’environnement) représente Saint-Barth à Paris lors du Copil.
En mai dernier, Saint-Barthélemy a accueilli le deuxième séminaire intitulé « Zéro déchet dans les Caraïbes ». Il va sans dire que la problématique des sargasses a été évoquée. Avec des pistes de réflexion, encore et toujours.

En juillet 2022, comme chaque année à la même période, des bancs de sargasses étaient venus s'échouer en différentes zones de l'île. Dans une publication en ligne datée du 20 juillet 2022, le président Xavier Lédée écrivait : « Nous continuons de travailler aux options existantes demain notamment par le biais de la commission Maîtrise du développement et modernisation du territoire. » Quatre jours plus tard, le 24 juillet, le président de la Collectivité ajoutait, toujours par le biais d'une publication en ligne : « Nous sommes en contact avec des scientifiques ayant beaucoup travaillé sur le sujet comme des associations. Nous travaillons sur les options locales de stockage. Nous sommes en contact avec les ministères pour voir comment travailler ensemble et aussi accompagner ceux qui ont été impactés économiquement par la situation. »

Du « matériel » pour 2026 ?
Dans une nouvelle publication en ligne datée du 21 juillet 2025, Xavier Lédée écrit : « Les échouages massifs observés ces derniers jours, notamment à l’Anse des Cayes, ont nécessité un renforcement immédiat des moyens de nettoyage. Dans le cadre du plan d'urgence sargasses, une réflexion a également été engagée et une série de matériel sera commandé dans les prochains jours. » Si la nature de ce matériel n’est pas précisée, l’édile assure : « J'ai conscience que les résultats ne sont pas encore suffisants et entend l'impatience de la population la plus impactée, tant la situation reste difficile à certains endroits, notamment à l’Anse des Cayes et à Marigot. Les équipes sur le terrain sont pleinement mobilisées. » Pour du ramassage. Une tradition, désormais.

 

 

Journal de Saint-Barth N°1625 du 24/07/2025

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