Lorsqu’il se présente aux grilles du groupe scolaire de Gustavia, le lundi 1er septembre, le vice-recteur de l’académie de Guadeloupe pour Saint-Martin et Saint-Barthélemy, Harry Christophe, est persuadé qu’il va effectuer une paisible visite de rentrée en compagnie de la directrice de cabinet du préfet, Marie-Hildegarde Chauveau, du président de la Collectivité territoriale, Xavier Lédée, et de la directrice de l’établissement, Agnès Combin. En réalité, après quelques échanges cordiaux dans la cour, le petit groupe d’officiels est rejoint par quatre représentants des parents d’élèves. Car après avoir appris, deux jours avant la rentrée, que des enseignants manquaient à l’appel à Gustavia, les parents ont la ferme intention d’obtenir des explications de la part du vice-recteur.
La directrice invite alors ses visiteurs à entrer dans une salle de classe inoccupée pour y formaliser la rencontre. A la grande surprise du vice-recteur qui, mécontent de la tournure des événements, grondera en fin de séance : « L’objet de ma venue était bien une visite pour la rentrée. Donc quand il s’agit d’autre chose, je tiens à être averti. » Car l’entretien s’est avéré, parfois, des plus incisifs.
Pour les représentants des parents d’élèves (Joyce Conroy-Aktouche, Anne-Lise Finot, Lætitia le Gac et Nicolas Benazzouz), l’objectif était d’obtenir des réponses sur les difficultés récurrentes du rectorat à garantir la présence d’enseignants le jour de la rentrée scolaire. Mais aussi les raisons qui expliquent « l’absence d’anticipation dans les recrutements » et « les disparités de traitements entre enseignants ».
« Les solutions existent »
Pour toutes les questions posées, les parents d’élèves assurent que des solutions existent. A tout le moins, ils en proposent, quand ils n’égrènent pas des textes de loi qui permettent une adaptation de la réglementation nationale aux particularités de Saint-Barthélemy. Ils précisent également que ces mêmes propositions ont déjà été soumises aux services du rectorat, à plusieurs reprises, dans le courant de l’année scolaire passée. Des courriels restés « sans réponse », assurent-ils. « C’est râlant d’être sur un si petit territoire, d’avoir des enseignants sur place mais qui ont d’autres activités parce qu’on ne peut pas les recruter, peste la directrice du groupe scolaire. Des gens qui sont déjà logés, qui plus est. » Harry Christophe affirme : « On ne peut pas recruter quelqu’un avant que le besoin se manifeste. » Un parent réplique : « Ce n’est pas un problème de personne mais un problème de méthode. Les solutions existent et le rectorat ne peut se décharger de ses responsabilités. »
L’une des représentantes des parents d’élèves souligne le fait que « le grand luxe à Saint-Barthélemy, c’est la proximité », et développe : « Cela nous permet de trouver des solutions. Il faut que les textes de loi soient adaptés à notre territoire. Il est inacceptable que le mammouth français nous empêche d’avancer. » Pour les parents, il est indispensable que le rectorat s’engage sur « des mesures effectives, concrètes et immédiates » afin que chaque poste soit pourvu en temps et en heures.
Si le ton monte parfois lors des échanges, ces derniers conservent une certaine cordialité. Notamment grâce aux interventions apaisantes de la directrice de cabinet du préfet. Arrivée en cours d’entretien, la sénatrice Micheline Jacques apporte également quelques éléments d’information aux parents d’élèves.
La rencontre s’achève par la formulation de cinq propositions : la rédaction d’une note sur le processus de recrutement, organiser une rencontre avant la fin de l’année civile pour préparer la rentrée 2026, explorer des pistes avec le ministère de l’Éducation nationale pour assouplir les procédures de recrutement, valider l’annonce du président Lédée de la création d’un poste d’enseignant d’anglais financé par la Collectivité, trouver une solution avec l’Agence régionale de santé pour une « mutualisation » du médecin scolaire.
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Une pré-rentrée agitée au groupe scolaire de Gustavia
La pré-rentrée était annoncée comme devant se dérouler dans la quiétude au sein du groupe scolaire de Gustavia. Il n’en a rien été. Le vendredi 29 août, la direction découvre que trois classes ne disposent pas d’un enseignant attitré. Deux de moyenne section de maternelle, une de CM2. Les parents d’élèves en sont informés et la perspective d’une rentrée chaotique provoque immédiatement une mobilisation quasi générale.
Colère, indignation, inquiétude, exaspération… Les sentiments qui animent à la fois l’équipe pédagogique de l’établissement et les parents d’élèves sont nombreux, et intenses. Pour plusieurs raisons. D’abord, le fait que le problème est récurrent depuis de nombreuses années. Certes, des rentrées se révèlent moins problématiques que d’autres. Mais la justesse des effectifs ne manque que rarement de poser des problèmes. Ainsi, en 2024-2025, le groupe scolaire a été contraint de fonctionner sans remplaçant. Sachant que l’école compte dix-huit classes, l’exercice s’est avéré pour le moins acrobatique. Cette fois, la réaction a été immédiate.
Tandis que les coups de fil et les courriels se multiplient à l’attention du rectorat et des élus de la Collectivité territoriale, la directrice prend l’avion à destination de Saint-Martin afin de d’assister à une réunion qui rassemble le nouveau recteur de l’académie de Guadeloupe, la nouvelle inspectrice et le vice-recteur, Harry Christophe.
Une mobilisation annulée
En l’absence de garantie quant à la présence d’un enseignant devant chaque classe le jour de la rentrée, le lundi 1er septembre, une mobilisation de l’équipe pédagogique et des parents d’élèves est programmée devant l’établissement. Néanmoins, des solutions apparaissent. Très vite, des entretiens avec des professeurs susceptibles d’occuper les postes rapidement sont programmés. Mais pour le lundi matin, ce qui signifie que des élèves ne pourront effectuer leur rentrée, faute d’enseignant. Toutefois, le dimanche 31 août, la décision est finalement prise de ne pas manifester devant l’école le lendemain matin.
En revanche, lors de sa visite au groupe scolaire le lundi 1er septembre en début d’après-midi, le vice-recteur Harry Christophe a été pris sous le feu des demandes d’explication formulées par les représentants des parents d’élèves. Selon ses déclarations, les postes devaient être attribués dans le courant de la semaine. Si tel n’est pas le cas, nul doute que le rectorat devra faire face à une grogne plus féroce de la part des personnels et des parents dans les prochains jours.
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La sénatrice Micheline Jacques rassure
Le samedi 30 août, la sénatrice de Saint-Barthélemy Micheline Jacques a apporté des précisions quant à la situation du groupe scolaire de Gustavia. Par le biais d’une publication en ligne, la parlementaire a déclaré s’être entretenue avec le vice-recteur, Harry Christophe, et a écrit : « En premier lieu, compte tenu notamment des difficultés de logement que nous connaissons, l’essentiel des enseignants ne veulent pas ou ne peuvent pas s’installer à Saint-Barthélemy. Par ailleurs, les règles de l’Éducation nationale ne permettent pas d’envisager de nommer des contractuels aux postes non pourvus avant le 1er septembre de cette année. Le recteur m’assure que des contractuels devraient être nommés de manière à ce que chaque classe ait un enseignant à compter du 1er ou du 2 septembre.
Il est évident que les règles d’affectation ne correspondent plus à la réalité et aux contraintes de Saint-Barthélemy. Je mets tout en œuvre pour qu’elles fassent l’objet d’une adaptation de la part de l’État. L’année dernière, chaque classe a été couverte, tout est en mis en œuvre pour qu’il en soit ainsi cette année encore. »
Dans le même temps, le deuxième vice-président de la Collectivité territoriale, Francius Matignon, chargé de l’éducation, s’est également fendu d’une publication en ligne. A propos du groupe scolaire de Gustavia, l’élu affirme : « Les trois postes qui restaient sans affectation seront pourvus pour la rentrée. Le délai s’explique par des vérifications nécessaires, notamment pour deux candidats déjà titulaires dans d’autres établissements. À ce jour, Monsieur le vice-recteur m’a confirmé ce matin que les contrats sont en cours de rédaction et que le nécessaire a été fait. »