Saint-Barth - sargasse project cirage

Pierre-Antoine Guibout et Yohan Adam, les fondateurs de Sargasse Project, ont reçu le premier prototype de cirage à base de sargasses. Une première étape avant la construction d’une usine de transformation en pâte à papier en Guadeloupe.

Les sargasses dans le cirage

Tandis que des tonnes de sargasses commencent à s’amonceler sur les côtes de Saint-Barthélemy, la jeune entreprise Sargasse Project connaît sa première grande avancée avec la réception de son premier produit transformé sorti d’un laboratoire.

 

Depuis 2019 et la fondation de leur entreprise Sargasse Project à Saint-Barthélemy, Yohan Adam et Pierre-Antoine Guibout poursuivent leur objectif qui est de parvenir à utiliser les sargasses pour en faire des produits transformés. Une idée judicieuse puisque la matière première s’échoue par milliers de tonnes chaque année sur les côtes de Saint-Barth mais aussi de Guadeloupe et de différentes îles de la Caraïbe. Toutefois, jusqu’à présent et malgré diverses tentatives, les deux entrepreneurs n’avaient pas encore trouvé la bonne formule. Du moins le croyaient-ils.
Dans un premier temps, en 2019, les deux associés rachètent une marque de cirage et de produits d’entretien. « On aime les marchés de niche », s’amuse Pierre-Antoine. Leur idée ? Intégrer de la poudre de sargasse dans leurs produits. Une démarche éco-responsable qui, malheureusement pour eux, se heurtent à plusieurs échecs auprès de différents laboratoires. Mais il va sans dire qu’une autre idée a, entre temps, germé dans l’esprit des deux compères : celle de transformer les sargasses en pâte à papier.

De l’échec à la réussite
Personne n’étant en mesure de leur proposer un savoir-faire dans ce domaine, Pierre-Antoine Guibout se mue en chimiste amateur, compacte une mixture et parvient à transformer les sargasses. « On a remporté plusieurs prix qui nous ont permis de nous faire connaître et d’obtenir des subventions, explique Pierre-Antoine. On a reçu diverses aides, dont celle de la Collectivité. On a pu nouer des contacts avec des acteurs privilégiés. » De fait, comme il le confiait déjà au JSB en 2021 (JSB 1408), à chaque déplacement dans l’Hexagone, le projet enregistre une progression. Le problème est que le Covid est passé par là.
« Ça nous a freiné car on était en phase de fabrication de prototype avec une entreprise en métropole, raconte Pierre-Antoine. Bien entendu, dans la liste des clients, nous n’étions pas prioritaires. » Et là, alors que l’idée de départ était passée au second plan, un laboratoire parvient à fabriquer un premier prototype de cirage avec des sargasses. « Ce sont eux qui nous ont sollicités, assure Pierre-Antoine. C’est amusant car on en revient au début du projet. » Depuis trois semaines, les deux associés ont reçu à Saint-Barth le fameux prototype tant attendu. Non sans fierté. « C’est Yohan qui a le prototype parce que, par son travail, il porte des chaussures en cuir, s’amuse Pierre-Antoine. Même si on continue sur notre idée d’emballage papier, recevoir le premier prototype de notre idée d’origine c’est peut-être le destin. »

Une usine de transformation en Guadeloupe
Signe du destin ou pas, ouvrir une usine de fabrication de pâte à papier à base de sargasses en Guadeloupe est plus que jamais d’actualité. Mais comme tout projet industriel, celui-ci rencontre quelques inévitables aléas. « On avance doucement, concède Pierre-Antoine. Nous n’avons pas de gros moyens mais on a des échéances ! Le temps passe très vite mais je maintiens que nous arriverons à obtenir le foncier avant la fin de l’année. » Pour que le projet soit viable, notamment pour entreposer des sargasses sèches à transformer en continu, plus l’eau et le stockage du produit fini, il faut compter 1600 mètres carrés. Avec l’objectif de transformer 2500 tonnes de sargasses par an. Rien d’inaccessible, particulièrement quand il est précisé que plus de 25 millions de tonnes de sargasses voguent chaque année sur les océans du globe.
Quant au choix de la Guadeloupe pour implanter leur usine, les deux associés y voient de simples questions de bon sens stratégique. « Un foncier moins cher, de l’espace, une main d’œuvre plus abondante et une quantité d’algues bien plus importante qu’à Saint-Barth », explique Pierre-Antoine. C’est à Petit-Bourg que pourrait être installée la première ligne de production de sa pâte à papier. Confrontée à un échouage massif de sargasses, la commune pourrait ainsi bénéficier des emplois créés par l’atelier de fabrication.

 

Les sargasses sont des algues brunes qui se développent depuis 2011 sur les littoraux des Caraïbes. En séchant, elles dégagent de l'hydrogène sulfuré et de l'ammoniac, qui peuvent provoquer maux de tête, nausées et vomissements. A partir d'un certain niveau de concentration, la sargasse attaque aussi les métaux et abîment voitures, motos ou ordinateurs. Sur les plages de Saint-Barthélemy, plusieurs milliers de tonnes sont ramassées chaque année.

 

 

Journal de Saint-Barth N°1470 du 28/04/2022

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