Saint-Barth - pêcheur  port de commerce

Regroupés en collectif, les marins pêcheurs de Saint-Barth menacent de bloquer le port dès lundi si la Collectivité ne trouve pas une solution rapide pour qu’ils bénéficient d’un prix du carburant spécifique.

Prix du carburant : l’ultimatum des marins-pêcheurs

La colère gronde sourdement depuis des mois. L’élection d’une nouvelle majorité avait pourtant fait naître un espoir dans les rangs des marins-pêcheurs de Saint-Barthélemy : celui d’être enfin entendus, écoutés, et satisfaits. Mais huit mois après la prise de pouvoir de la nouvelle équipe gouvernante, les professionnels de la mer estiment ne rien voir venir qui puisse les rassurer quant à une prise en compte de leurs difficultés. Particulièrement en ce qui concerne l’accès à un prix acceptable du carburant, qui reste la principale difficulté à laquelle ils se heurtent quotidiennement. Par conséquent, face à l’inertie supposée de la Collectivité territoriale, un collectif de marins-pêcheurs s’est constitué et a lancé dès lundi dernier un ultimatum aux élus. Si aucune solution n’est trouvée dans les prochains jours, ils bloqueront le port de commerce. Jusqu’à ce qu’une issue favorable soit entrevue.
Pour les pêcheurs, il est indispensable de préciser que ce mouvement n’est pas le fait du Comité territorial des pêches. Même si ce dernier soutien leur action. « Si on communique aujourd’hui, c’est pour préparer la population et les restaurateurs à un éventuel blocage de la zone portuaire, explique un membre du collectif. En aucun cas nous ne voulons prendre la population en otage. Mais à ce rythme, la filière pêche va mourir à Saint-Barth. » Et le collectif d’insister : « Depuis huit mois, oui, des efforts et du travail ont été faits, mais ça ne va pas assez vite, ce n’est pas assez radical. On est conscient de l’inflation et de tous les autres problèmes. Mais Saint-Barth doit être le seul port français qui n’a aucune solution pour ses marins-pêcheurs au niveau du carburant. On envoie des courriers (à la Collectivité, ndlr), on nous répond à côté. »

« L’essence, 50% de nos dépenses »
Depuis le début de l’année, les pêcheurs ont vu le prix de l’essence doubler. « Quand on explique ça à la Collectivité, on nous répond d’augmenter le prix du poisson, peste un marin. Est-ce que la population et les restaurateurs sont prêts à payer deux fois plus cher que le prix actuel ? C’est la question. Pour nous, aujourd’hui, l’essence représente 50% de nos dépenses. » Le collectif assure qu’au cours de précédentes réunions, la Collectivité leur aurait proposé de supprimer les 5% de droit de quai, les 13 centimes de taxe du revendeur et les 8 centimes de taxe de fond routier. « La Collectivité ainsi que le port nous avaient affirmé que ces taxes pourraient nous être retirées avant même l’obtention de l’essence au tarif pêcheur », écrit le collectif dans son courrier adressé au président de la Collectivité.
Invité à s’exprimer, Xavier Lédée affiche une certaine perplexité vis-à-vis de la démarche et de l’action de ce collectif. Même s’il admet comprendre l’impatience des pêcheurs. Toutefois, il déclare : « Nous sommes là depuis sept mois et il y a déjà eu une avancée sur le prix du carburant qu’il n’y avait jamais eu avant. Nous avons obtenu une réduction de cinquante centimes et manifestement ce n’est pas suffisant. Ces centimes négociés sont un sacrifice car ils ont un impact sur tout le monde. » Le président de la Collectivité rappelle qu’une enquête menée avec la préfecture est toujours en cours afin d’évaluer la justesse des tarifs des carburants. « Je comprends qu’il y ait un ras-le-bol et que la situation est difficile, assure-t-il. On reste disposé à discuter, ouvert aux échanges et et on continue de chercher des solutions. Mais supprimer des taxes n’est pas aussi simple. »

« Nous prendrons les mesures nécessaires »
Par ailleurs, sur la menace de blocage du port de commerce, Xavier Lédée apporte une réponse des plus fermes. « Tout le monde a des droits de manifester mais menacer de bloquer le port, c’est autre chose, lance-t-il. Il est hors de question que la population soit prise en otage. S’il y a un blocage, nous prendrons les mesures nécessaires. » Et le président de relever l’étrangeté de la situation. « On reçoit un courrier signé d’un collectif qui menace d’un blocage mais personne ne vient nous voir pour discuter », se plaint-il.
De son côté, le collectif affiche sa détermination. « Tant que l’on n’aura pas ce que l’on veut, on ne lâchera pas, affirme l’un de ses membres. Si le port doit rester bloqué cinq jours, il le restera. Je le répète, le but n’est pas de prendre en otage la population. On a bien précisé depuis des mois que lorsque la saison arrivera, on sera pris à la gorge. On veut une pompe à essence spécifique aux pêcheurs avec un prix abordable. Rien de plus. Et c’est à la Collectivité de s’occuper de ça, pas aux marins pêcheurs. »

 

Déjà un mouvement en 2007
En décembre 2007, les marins-pêcheurs de Saint-Barth avaient organisé un mouvement identique à celui qui risque d’être lancé dès lundi prochain. En effet, leurs revendications portaient déjà sur un prix de l’essence trop élevé. A l’époque, les pêcheurs réclamaient que le prix du litre soit fixé sur les mêmes bases qu’en Guadeloupe, soit 82 centimes. Dès les premières heures du blocage du port, le président Bruno Magras était allé à la rencontre des « bloqueurs » pour leur signifier qu’il n’avait pas l’intention de négocier sous la contrainte. Face à ce refus, les pêcheurs avaient pris la décision d’investir également l’aéroport en obstruant l’accès à la salle d’embarquement pendant près de trois heures. Bruno Magras accepte d’organiser une réunion et l’accès au port sera rétabli en fin d’après-midi. 15 ans plus tard, il semble que l’île se dirige vers une situation similaire.

 

Journal de Saint-Barth N°1494 du 17/11/2022

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