Saint-Barth -

La réforme du régime cat’nat’ se précise

Jean-Louis Charluteau, de Generali (GFA Caraïbes), a livré récemment quelques éléments sur la réforme du régime de catastrophe naturelle attendue mi 2019, décidée à la lumière de l’ouragan Irma.

 

L’assureur Generali, plus connu dans nos îles sous le nom de GFA Caraïbes, fort d’une part de marché de 15 % à Saint-Barth et 30% à Saint-Martin (pour 6.400 contrats au total), restera présent dans ces îles malgré le passage de l’ouragan Irma. Tout comme ses homologues Allianz et Groupama. Toutefois, les compagnies sont unanimes pour dire qu’elles seront plus sélectives sur les risques, et attendent beaucoup de la réforme du régime cat’nat’ promise par Emmanuel Macron.

 

« Ces territoires concentrent un certain nombre d’aléas qui, sans le recours à la solidarité nationale organisée par le régime des catastrophes naturelles, seraient de nature à remettre en cause la présence d’un assureur » explique Jean-Louis Charluteau, directeur de la réassurance et risques naturels de Generali, à Tribune Assurance. « A ma connaissance, les réformes du régime cat’ nat’ envisagées sont plutôt des réformes en vue de faire disparaître quelques injustices, introduire un peu plus de prévention dans le dispositif, responsabiliser davantage.» Le projet doit être présenté par le gouvernement avant l’été 2019. Emmanuel Macron, lors de sa dernière visite à Saint-Martin, a appelé à « un système plus incitatif, plus rapide, plus généreux pour l’assurabilité des outre-mer, dans le cadre d’une stratégie durable ».

 

Réduire les injustices

Jean-Louis Charluteau donne quelques éléments sur le contenu de cette réforme : « Supprimer quelques inégalités devant la loi (la franchise qui pesait sur les artisans, commerçants et prestataires de service a pu avoir pour conséquence de laisser à la charge de ces professionnels une partie trop importante du sinistre qu’ils ne pouvaient pas supporter) ; donner plus d’importance à la prévention (avec par exemple, la possibilité pour les grandes entreprises et les collectivités locales de déterminer elles-mêmes le niveau de franchise qu’elles sont prêtes à supporter en cas de cat’nat’). On veut encourager ces acteurs à prendre des mesures de précautions en relation avec la part de risques qu’ils sont prêts à conserver. »

 

Frais de relogement

Les frais de relogement après une catastrophe naturelle pourraient être pris en charge. « Nous demandons leur prise en compte. Ils sont par définition exclus de la garantie légale. Il y avait une sorte d’inégalité des assurés à ce niveau-là. En effet, lorsque la catastrophe se réalise, certains contrats comprennent la couverture de frais de relogement, tandis que d’autres contrats non. Nous proposons d’investir collectivement, la Caisse centrale de réassurance et nous, dans un dispositif qui reconnaisse l’éligibilité des frais de relogement, de les prendre en charge au titre du régime cat’ nat’, et ainsi de mettre les victimes sur un pied d’égalité. »

 

Inciter les habitants à s’assurer

Le taux d’assurance des logements aux Antilles est nettement plus bas qu’en métropole. « Irma a mis en évidence une fragilité : il faut promouvoir la culture du risque sur ces îles », commente Gorette Plana, directrice outre-mer d’Allianz, dans le dernier numéro de l’Argus de l’assurance. Avec la multitude de risques qu’ils courent, les habitants se heurtent aussi, parfois, au refus des assureurs. La Fédération française des assurances, qui travaille avec le gouvernement sur la réforme, souhaite mieux adapter le Bureau central de tarification, qui pourra trouver à ces personnes un assureur et fixer lui-même le taux de surcotisation, le montant de la franchise et les mesures de protection.

 

Les collectivités doivent veiller au grain

Les assureurs évoquent aussi l’importance du PPRN, Plan de prévention des risques naturels. Un document que Saint-Barthélemy commence juste à élaborer. Le PPRN cartographie les risques sur le territoire, mais selon les patrons de compagnie d’assurance, il doit être intégré au PLU (la carte d’urbanisme pour Saint-Barth) afin d’avoir une réelle utilité. « Si on reconstruit à l’identique, les conséquences seront les mêmes. La profession et les pouvoirs publics doivent agir là-dessus », tranche Bernard Labilloy, directeur de la Caisse centrale de réassurance (CCR). Des normes de construction comme condition d’assurabilité ? C’est une piste qu’étudie la Fédération française des assurances. « Il existe déjà des normes spécifiques pour ces territoires, concernant la pose de volets anticycloniques ou encore l’amarrage des toitures », note Gorette Plana. « Le plus important est de contrôler leur bonne application. »

 

Prévention avant tout

Comment pousser les assurés à mieux se prémunir contre les aléas naturels ? « Nous voudrions faire du fond Barnier un outil d’aide à la prévention individuelle des risques. Le fond Barnier est alimenté par un prélèvement de 12 % sur les primes Cat Nat des assurés. Or, ces ressources ne sont pas assez mobilisées pour financer les travaux de prévention », explique Jean-Louis Charluteau. « Nous souhaitons modifier son régime de fonctionnement afin d’en faire un outil capable d’aider les assurés exposés soit à faire des travaux de mise en conformité ou de prévention, soit à financer des mesures d’expropriation en cas de classement en zone noire. Nous voudrions quelque chose de plus concret, de plus individuel que le financement de mesures collectives. » Les recettes du fonds Barnier s’élèvent à 200 millions d’euros par an.


JSB 1302






Journal de Saint-Barth N°1302 du 08/11/2018

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