Difficulté financière, dysfonctionnements administratifs, les problèmes s’accumulent pour Air Antilles. Dernière avarie en date : la décision prise le lundi 8 décembre par la direction générale de l’aviation civile (DGAC) de suspendre le certificat de transport aérien de la compagnie. Le soir même, à minuit, tous les vols lui ont été interdits. Ses appareils sont donc cloués sur le tarmac, jusqu’à nouvel ordre.
La décision de la DGAC fait suite à un audit réalisé du 2 au 4 décembre. Selon Air Antilles, cet audit a mis en évidence « un certain nombre de vérifications documentaires et organisationnelles devant être finalisées dans des délais rapprochés », sans remettre « aucunement en cause la sécurité immédiate des vols ». L’audit semble aussi avoir mis en lumière d’autres dysfonctionnements, comme le fait que des postes stratégiques ne seraient pas occupés. De plus, la DGAC a indiqué que « des défaillances très significatives dans les processus de sécurité de ses passagers et de ses personnels » ont été relevées.
« Des actions correctives »
La suspension du certificat de transporteur aérien « entraîne automatiquement celle de la licence d’exploitation, interdisant également à Air Antilles de vendre des billets », précise la direction générale de l’aviation civile. Désormais, la compagnie dispose d’un délai d’un mois pour mettre en œuvre « des actions correctives » susceptibles de permettre le rétablissement de son certificat de transporteur aérien.
La suspension infligée par la DGAC est un énième coup dur pour la compagnie et ses salariés, mais également pour la Collectivité territoriale de Saint-Martin, qui en est l’actionnaire majoritaire. Le 6 octobre, le conseil territorial a accordé un prêt exceptionnel de trois millions d’euros à la société Air Antilles. Un versement supplémentaire qui a fait grimper le montant total des investissements à plus de vingt millions d’euros (dont 4,4 par l’autre actionnaire, la Cipim).
« De la paperasse »
Interrogé le lundi 8 décembre, le président de la Collectivité de Saint-Martin, Louis Mussington, a évoqué « quelques anomalies au niveau des mesures de sécurité qui auraient dues être prises en amont ». Il a ajouté : « Je reproche à notre direction de n’avoir pas pris les bonnes décisions pour éviter que des mesures de cet ordre soient prises. Ça n’a rien à voir avec les avions en eux-mêmes, c’est de la paperasse. » Le lendemain, lors d’une conférence de presse donnée à Saint-Martin, il a précisé : « Les dysfonctionnements identifiés par la DGAC concernent essentiellement des aspects administratifs et réglementaires. Un plan d’action correctif a été élaboré et d’ores et déjà présenté le 9 décembre. » Face à la tempête, le président Mussington affiche une confiance désarmante et affirme avoir « bon espoir » qu’une reprise des opérations d’Air Antilles interviennent rapidement. Une perspective qui semble particulièrement optimiste à la vue des difficultés récurrentes dans lesquelles la compagnie patauge depuis des mois.
Pourtant, Louis Mussington n’en démord pas. « Ce n’est pas la flotte d’Air Antilles qui est remise en question, c’est la paperasse (…) Vendredi, samedi, dimanche et lundi toute la journée, les vols étaient opérationnels. » Par conséquent, selon le président, l’état des appareils n’est pas en cause mais bien des erreurs administratives. Quoi qu’il en soit, depuis l’arrêt des vols, ce sont les passagers de la compagnie qui rencontrent des difficultés. Dans un premier temps, les agents d'Air Antilles les ont replacés sur les vols d'autres compagnies. En payant les billets à leurs passagers. Une solution qui n'a pas duré car trop coûteuse. Depuis mercredi, les agents, notamment au guichet d'Air Antilles à Saint-Barthélemy, proposent aux personnes qui détiennent un billet pour un vol de les rembourser ou de les replacer sur... un futur vol, lorsque la compagnie aura repris ses opérations.
Voilà quelques semaines, l’intersyndicale de la compagnie avait dénoncé une gouvernance « silencieuse » et «inexpérimentée », pointant des « annulations de vols en cascade », une « dégradation de la qualité de service » ainsi qu’une « situation critique » pour l’exploitation. En septembre, Air Antilles avait obtenu une prolongation de quatre mois de sa licence d’exploitation. Un sursis destiné à lui permettre de trouver un nouvel investisseur, sans lequel la survie de la compagnie sera définitivement compromis. Néanmoins, avant de songer à convaincre un investisseur, il va désormais falloir récupérer un certificat de transport aérien auprès de la direction de sécurité de l’aviation civile.
