Saint-Barth - supermarché

Photo d’illustration ©Bismilah

Approvisionnement en produits alimentaires : le CESCE répond aux interrogations des référents de quartier

L’une des caractéristiques du Conseil économique, social, culturel et environnemental (CESCE) est qu’il aime à travailler dans la discrétion. Un gage de sérénité, à n’en pas douter. Ainsi, le 14 février, le Conseil a publié sur son site (cesce-stbarth.fr) un rapport sur les enjeux du transport de marchandises à Saint-Barthélemy. Le document, qui vient poursuivre le travail engagé en mai 2024 par le CESCE, dresse un état des lieux de la situation actuelle, identifie les risques et les défis et propose des pistes de réflexion visant à atténuer les impacts des changements à venir et a mieux anticiper la gestion plus complexe des flux logistiques. Un travail qui a éveillé la curiosité de plusieurs référents de quartier, eux-mêmes soumis aux questions posées régulièrement par leurs voisins. Par conséquent, Davy Magras, Liza Blanchard et Emmanuel Leprince ont sollicité un entretien avec des élus du Conseil afin d’en apprendre davantage.

Grèves, escales, pannes…
Les questions posées sont celles qui taraudent la plupart des habitants de Saint-Barthélemy, à tout le moins lorsqu’ils ne disposent pas déjà des réponses. Par exemple : « Les pénuries de produits alimentaires sont-elles uniquement dues aux grèves des dockers français ? » Réponse du CESCE : « Les pénuries ne sont pas dues uniquement aux grèves des dockers français, bien que celles-ci contribuent largement aux perturbations (33 jours de grèves totale ou partielle entre le 1er janvier et le 3 avril 2025). D’autres facteurs incluent les conditions météo défavorables sur l’Atlantique, les pannes de navires, la congestion du port de commerce de Public, les escales des bateaux annulées (livraison des conteneurs à Port of Spain au lieu de Sint-Maarten plusieurs fois par an, etc.) mais aussi les problèmes d’approvisionnement ou de préparation de commandes au sein des enseignes en métropole. L'approvisionnement en produits frais, très dépendant de la régularité des transports, souffre particulièrement de ces aléas cumulés. »

Pas d’escale supplémentaire pour Saint-Barth
Sur le fait que les magasins de Saint-Martin ne souffrent pas des mêmes manques, le CESCE explique : « Saint-Martin bénéficie de sources d’approvisionnement diversifiées du fait de sa double nationalité, d’un territoire plus grand, d’un plus grand nombre de magasins d’alimentation et d’infrastructures mieux adaptées, comme la société Frigodom, offrant du stockage réfrigéré. Saint-Barth, en revanche, ne bénéficie pas de ce type de structures et il y a toujours une escale supplémentaire pour la marchandise en provenance d’Europe : la Guadeloupe ou Sint-Maarten. » Une donnée que le Conseil développe dans son rapport.
Contraint par des directives de la France et de l’Union européenne, le groupe CMA CGM a adopté des navires plus respectueux de l’environnement, fonctionnant au gaz liquéfié (GNL) et au biométhane, avec une capacité de transport accrue. Les nouveaux navires pourront transporter jusqu’à 7.700 conteneurs de 20 pieds, soit 26 % de capacité en plus par rapport aux navires actuels desservant Sint-Maarten. Toutefois, ces nouveaux navires ne desserviront plus le port de Philipsburg (Sint-Maarten), se recentrant sur les grands ports maritimes de Guadeloupe et de Martinique, transformés en « hubs » portuaires. Ces modifications de lignes seront mises en place dès le prochain mois de septembre. Nul doute qu’elles auront des conséquences sur l’approvisionnement de Saint-Barth en denrées alimentaires.

Sint-Maarten ou la Guadeloupe ?
De fait, le CESCE explique que passer par Sint-Maarten «offre davantage de souplesse» pour acheminer la marchandise jusqu’à Saint-Barth : plus de compagnies maritimes, rotation plus courte. Mais il arrive que l’escale de Sint-Maarten soit omise par la CMA-CGM, lorsque le bateau prend du retard, au départ ou pendant la traversée. « Les conteneurs sont alors livrés sur une autre île (souvent Trinidad-et-Tobago) et il faut ensuite la réacheminer vers Saint-Barth ce qui rallonge les délais quand cela se produit », souligne le Conseil.
Parallèlement, choisir de passer par la Guadeloupe n’est pas non plus toujours une valeur sûre car « il y a moins de solutions pour acheminer les conteneurs jusqu’à Saint-Barth », indique le CESCE dans son rapport, ajoutant : «Les navires doivent être disponibles et sont moins nombreux. » De plus, les compagnies maritimes inter-îles respectent un planning strict et, quand un bateau en provenance d’Europe arrive avec du retard, les porte-conteneurs qui effectuent la liaison jusqu’à Saint-Barth continuent de remplir leurs autres contrats.

14 préconisations
Des retards qui ont pour conséquence principale d’arriver à destination avec, à bord, des produits déjà périmés. « En 2024, 26 tonnes de produits alimentaires ont fait l’objet d’une demande de destruction suite aux retards de livraison, explique le CESCE. Cela n'inclut pas les produits sortis des rayons et détruits lorsque la date limite de consommation est dépassée après leur mise en rayon. » Pour remédier à une partie de ce gâchis, l’une des quatorze préconisations du CESCE porte sur le fait que les enseignes présents à Saint-Barth « explorent la possibilité de stocker des produits frais ou secs en Guadeloupe et à Saint-Martin auprès de sociétés spécialisées telles que Frigodom ».
Parmi les autres préconisations inscrites dans le rapport du CESCE, l’amélioration de l’accès aux marchandises périssables sur le port de Saint-Barth, le développement du fret aérien, la mise en place d’indicateurs de performances « afin d’évaluer l’impact de chaque acteur sur les retards de conteneurs », l’intégration de Saint-Barthélemy à la Caricom (Communauté des États de la Caraïbe), diversification des circuits d’approvisionnement (notamment auprès des voisins caribéens), développer une ligne commerciale directe avec la République dominicaine, optimiser le stockage ­portuaire…  Un vaste chantier.

 

 

Journal de Saint-Barth N°1614 du 02/05/2025

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