Saint-Barth -

Un Conseil en discordance pour terminer l’année

Certaines séances du Conseil territorial s’avèrent nettement plus agitées que d’autres. Ce fut le cas pour celle qui a clôturé l’année 2022. Malgré un ordre du jour relativement bien fourni, puisqu’il présentait quinze points à examiner, rien ne laissait augurer les quelques « prises de bec » qui ont jalonné la réunion. Entre les élus de la majorité et ceux de l’opposition, principalement la sénatrice Micheline Jacques, très en verve et remontée comme une pendule, mais également entre membres du même groupe. Une poignée de discordances internes qui n’illustrent évidemment pas une implosion mais davantage une volonté de chaque élu de ne pas se plier à la ligne de son groupe lorsque la position de celui-ci ne correspond pas à leur sensibilité ou leurs convictions. Ainsi, après deux votes à l’unanimité pour entériner l’avancement au grade d’adjudant de sapeurs-pompiers volontaires puis la « réactualisation du régime indemnitaire applicable aux agents de la fonction publique qui exerce à Saint-Barth », la modification du temps de travail des services territoriaux a soulevé quelques inquiétudes. Notamment chez Bettina Cointre, 3e vice-présidente, qui s’est interrogée sur le fait que les jours accordés aux agents en cas de maladie d’un enfant passent de 15 à 6. « On nous demande de mettre des plafonds, ce sont des régularisations, explique le président, Xavier Lédée. On applique les textes mais il y a des spécificités à Saint-Barth et on pourra en discuter pour réfléchir à des aménagements. » Sur ce point, trois élus de la majorité s’abstiennent : Pascale Minarro-Baudoin, Caroline Maurel et Bettina Cointre. Si les délibérations suivantes (désignation d’un délégué élu pour représenter la Collectivité au Comité national des actions sociales et de deux autres aux conseils de surveillance de l’Agence régionale de santé et de l’hôpital de Bruyn) ne posent guère de difficulté, la suivante déclenche un long débat.

Désaccords sur la question énergétique

Pour les élus, il s’agit de se prononcer sur la signature d’un avenant au contrat de délégation de service public pour la modernisation et l’exploitation du service de propreté confié à Ouanalao environnement. En l’espèce, il s’agit du sixième avenant au contrat initial signé en 2016. Il a pour but de régulariser le coût final de construction du deuxième incinérateur, d’instaurer un intéressement au bénéfice de la Collectivité sur la Ted (taxe enlèvement des déchets), de redéfinir certains tarifs directs de déchetterie (voir tableau), d’autoriser le délégataire à mettre en place pour son compte une turbine à condensation et de prolonger à neuf ans la durée initiale du contrat de délégation. Ce sont principalement la hausse des tarifs en déchetterie et le coût de la nouvelle turbine qui vont provoquer un débat. Dans un premier temps, Romaric Magras, tête de liste du groupe d’opposition Saint-Barth d’Abord (SBDA),  estime que « l’investissement (pour se doter d’une nouvelle turbine, ndlr) est énorme pour ne produire que 310 kW ». Celle-ci coutera plus de 6 millions d’euros. Micheline Jacques, également élus de SBDA, renchérit : « Je suis la première à vanter notre système de traitement des déchets. Mais là, ce que je vois, c’est que l’on est en période d’inflation et qu’on augmente toutes les taxes pour financer un moteur à six millions d’euros. » Xavier Lédée réplique en indiquant que « les dépenses faites aujourd’hui sont nécessaires par rapport à l’incapacité à produire suffisamment d’énergie ». Rudi Laplace, également élu d’opposition, remarque « une zone de flou sur le coût prévisionnel de cet équipement » et lance : « Avec six millions d’euros, on finance une centrale solaire de 6 mégawatts. » Le 4e vice-président chargé des questions liées à l’énergie, Maxime Desouches précise : « Paprec fait avec ce qu’il a et ils proposent de faire ce montage. Après, ce sera à la commission de régulation de l’énergie de décider. » Si elle écoute patiemment les échanges, Caroline Maurel, conseillère territoriale de la majorité, réclame la parole depuis quelques minutes. Lorsqu’elle l’obtient, enfin, elle se lance dans une plaidoirie contre les augmentations pour les professionnels à la déchetterie. Elle considère que le surcoût sera nécessairement répercuté sur les factures présentées aux particuliers sur d’autres opérations. Un argument vertement contesté par plusieurs élus, au grand dam de Caroline Maurel, qui ne cède pas. De fait, comme Micheline Jacques, Alexandra Questel et Sandra Baptiste, elle vote contre cette délibération (Romaric Magras s'abstient), qui est toutefois adopté à la majorité.

Les référents de quartier, « une usine à gaz »

Après avoir adopté le projet de Programmation pluriannelle de l’énergie (PPE, JSB 1499), le Conseil s’attaque à la charte des référents de quartier. L’idée est de désigner un habitant de chaque quartier de l’île pour faire remonter les problèmes jusqu’aux élus. Pour Micheline Jacques, qui affirme que « son groupe votera contre », cette mesure n’est rien d’autre qu’une « usine à gaz » qui dénote « un réel problème de communication ». Xavier Lédée s’étonne de l’interprétation faite par la sénatrice de la proposition, soutenu en cela par Dimitri Lédée, élu de la majorité, qui remarque : «Je ne lis rien dans le texte qui empêche un habitant de passer directement par un élu plutôt que par le référent. » Mais c’est du côté des élus d’opposition que va s’exprimer un certain malaise vis-à-vis de la position tranchée de Micheline Jacques. Ainsi, Rudi Laplace assure être « un peu désolé » mais déclare être « en désaccord » avec son groupe sur cette question, « d’autant que nous avions aussi évoqué la mise en place de référent de quartier pendant la campagne », rappelle-t-il. Même embarras du côté d’Alexandra Questel, élue d’opposition mais également membre du conseil exécutif. Interpellée par Bettina Cointre qui souligne le fait qu’Alexandra Questel ne s’est pas opposée à cette mesure lors de la dernière réunion, la jeune conseillère tente de nuancer sa position et celle du groupe auquel elle appartient. Toutefois, à l'instar de Caroline Maurel et Sandra Baptiste, elle s'abstient lors du vote pour l’adoption de la délibération. Romaric Magras, Micheline Jacques et Francius Matignon votent « contre ». La délibération est adoptée à la majorité.

Des « Miss » et des sportifs

Si la subvention de 30.000 euros accordée par la Collectivité afin de financer une partie du voyage scolaire des élèves des classes de 3e du collège Mireille Choisy dans une station de ski et à Paris fait l’objet de quelques discussions, le point est adopté à l’unanimité. En revanche, les échanges se font un peu plus vifs lorsqu’il est proposé de verser la même somme au Comité Miss Saint-Martin Saint-Barthélemy pour financer les frais occasionnés par le déplacement des candidates de Saint-Barth sur l’île voisine à l’occasion du concours régional. Rudi Laplace compare le montant de cette subvention à celui des sommes allouées aux jeunes sportifs de l’île en remarquant que ces derniers « font rayonner Saint-Barth sur plusieurs années », et pas seulement le temps d’un concours. Présidente du comité du tourisme, Pascale Minarro-Baudoin rappelle que plus de sept millions de téléspectateurs regardent la soirée électorale à la télévision que « la participation à Miss France permet de mettre en avant la destination Saint-Barth ». Caroline Maurel, Francius Matignon, Alexandra Questel et Romaric Magras s’abstiennent lors du vote mais la subvention est adoptée. Les trois dernières délibérations, d’ordre budgétaire, sont adoptées à l’unanimité. 

Journal de Saint-Barth N°1501 du 05/01/2023

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